La fin de l’anonymat

Ce n’est peut être pas une surprise pour vous. Ce n’est peut être même une surprise pour personne. Mais l’anonymat n’existe plus.

Quand je parle d’anonymat, je parle de votre identité globale, de la possibilité pour n’importe qui sur terre de vous identifier instantanément uniquement depuis votre visage. Je ne parle pas seulement d’une recherche avec vos noms et prénoms sur google.

Si je ne vous connais pas, que je vous trouve jolie, et que je vous croise dans la rue, il m’est aujourd’hui possible de vous envoyer des demain des fleurs par la poste sans vous avoir parlé. Juste en vous prenant discretement en photo avec mon téléphone portable.

Et ce, même si je suis en voyage en Australie.

Cet article va peut être vous paraître long, mais j’ai jugé nécessaire d’appuyer mes propos par une démonstration technique réalisée ces derniers jours.

1) L’API Facebook

Tout part de là. Il y a quelques semaines, j’ai voulu me faire la main sur le développement d’applications facebook. Si vous n’y connaissez pas grand chose, les applications sont par exemple des jeux auxquels vous jouez directement depuis votre profil facebook.

Pour permettre à ces applications de dialoguer avec votre profil, par exemple récuperer votre photo, votre liste d’amis, facebook a mis en place une API.

Résumons le rôle de cette API à une passerelle entre mon application et facebook.

Lors de l’installation de l’application, vous pouvez donner acces ou non à certains éléments de votre profil. Comme vos albums photos et ceux de vos amis.

Et à ma grande surprise, le flux concernant les albums photos et les photos contient également les personnes marquées dans le photos.

Et les coordonées de leur visage.

Voila mon point de départ. A l’heure actuelle, Facebook est une base de donnée de visages, accessible à n’importe qui programme une application.

Quand ça m’a interpellé, on m’a prit pour un parano. J’ai donc décidé d’aller un peu plus loin dans mon raisonnement en développant une petite application…

2) Mon application

Ici, rien de compliqué. Lorsque vous installez mon application, elle vous demande l’autorisation d’accéder à vos albums.

Son principe est simple, elle scan tous vos albums et les albums de vos amis, et lorsqu’elle trouve une photo avec quelqu’un de marqué, elle crée, chez moi, un répertoire qui porte le nom de votre ID facebook, dans ce repertoire, un sous repertoire portant l’ID de l’album, et enfin, y crée une copie de la photo hébérgée sur facebook.

J’ai donc, “chez moi”, la photo que vous aviez hébergée sur facebook, bien rangée dans un dossier.

Ensuite, j’utilise le XMP pour rajouter des informations dans le fichier de votre photo.

Pour faire simple, si vous aviez une photo entre les mains, le XMP correspondrait à ce que vous ecriveriez au dos de la photo. Dans notre cas, par exemple “Emile et Léa”.

Sauf que le XMP va un peu plus loin, il permet de preciser un cadre dans lequel est le visage de la ou les personnes marquées. Ca tombe bien, Facebook me donne les coordonées de ces visages…

J’ajoute donc dans l’image les personnes présentes, et leur position.

Et ce pour chacune de vos photos. Et pour chacune des photos de vos amis auxquels vous avez accès. Et ce pour chacune des photos des gens qui ont installé mon application.

A ce stade, j’ai entre les mains les mêmes informations que facebook, ni plus, ni moins, mais hébergées chez moi.

3) Un petit coup de main de Microsoft

Il ne me reste plus qu’à “mouliner” tout ça. En effet, pour le moment j’ai tout un tas de photos, avec des gens identifiés dessus. Mais rien ne me permet encore de les “reconnaitre”. Il faudrait que je prenne chaque photo, et que je regarde qui est dessus. Berk. Je n’ai pas la mémoire des visages.

J’installe donc Windows Live Photo Gallery, dans sa version actuellement en Beta.

Windows Live Photo Gallery, c’est le logiciel fourni par microsoft avec Windows lorsque vous achetez votre PC. Pas la peine de preciser qu’il est accessible à tout le monde donc.

Je lance le logiciel, j’ajoute le répertoire qui contient toutes les photos, et je le laisse travailler.

Il va aller indexer toutes mes photos, et regrouper celles qui concernent chacune des personnes. Je vais peut être à un certain moment avoir un problème d’homonyme, mais tant pis, ce n’est qu’une experience après tout, je ne suis pas le FBI.

4) Et maintenant ? A quoi ça sert ?

Et bien c’est à ce moment là que je vous répete : vous ne pouvez plus être anonyme.

Je vais à Paris, dans le metro, et je prend une photo.

A mon retour, je la glisse dans Photo Gallery. Il détecte les visages, et me propose gentillement :

“S’agit il de Léa ?”

Ensuite ? Je scan une photo dans le journal local. Une photo de groupe d’un meeting UMP.

“S’agit il de Nicolas ?”

Ou alors, j’étais à une soirée, cette nana était vraiment canon

“S’agit il de Marjo Truc ?”

Je vais sur 123people.fr et je recherche Marjo Truc.

La boucle est bouclée.

5) Ok, tu m’a fait peur, on fait quoi maintenant ?

Le but de cet article était simplement de vous faire comprendre qu’à l’heure actuelle, avec quelques lignes de code et des outils grands publics, je peux vous identifier. N’importe ou, n’importe quand.

Est ce que cela doit vous faire peur ? C’est simplement notre époque.

L’évolution, les usages ont voulu que l’indexation de personnes et d’identité se fasse par les personnes elles mêmes, de façon ludique, et non par un état / pouvoir totalitaire.

Qu’est ce que ça change ? Rien. Vous êtes fiché, vous existez.

Il faut prendre conscience de ce fait. Il faut en informer les plus jeunes. Il faut vivre avec.

La solution d’empecher Facebook de communiquer ces informations ? Inutile, un autre jour, un autre site le fera.

Mais peut être faudrait il lancer une réflexion sur la centralisation d’identité, seule façon de la contrôler, ce qui me fait, je l’avoue, encore plus peur…

—-

A lire également :